Sélectionné au festival Les Pépites du cinéma et au festival Africolor, « Nous irons vivre ailleurs » est sorti en salles le 11 décembre 2013.
A l’occasion de la Journée Internationale des Migrants, une projection-débat de « Nous irons vivre ailleurs » a eu lieu le 18 décembre dernier, à l’Assemblée Nationale. Nous avons eu la chance d’assister à cette projection exceptionnelle.
Avec ce film, le réalisateur Nicolas Karolszyk a souhaité raconter la migration, dépeindre la frontière Nord-Sud à travers le
regard d’un jeune migrant…
Voici le synopsis: « Quelque part en Afrique, Zola se laisse convaincre par un énigmatique et charismatique chef d’entreprise que l’Europe est la seule sortie de secours à ses galères. La peur au ventre, Zola décide donc d’entreprendre un périlleux voyage pour la France. »
L’avis des Écrans de Claire
Nicolas Karolszyk, dont le nom est l’anagramme (avec un K supplémentaire ) d’un autre Nicolas, ex- président de la France , est un cas particulier dans le monde du cinéma.
Issu de l’immigration, de la banlieue parisienne, de la génération rap (présent dès le générique), il a fait preuve d’une grande ténacité et a dû être très motivé – motivé pour réaliser seul, sans équipe, sans argent ce film militant…
Selon les termes du jeune cinéaste, c’est du cinéma » guérilla« , inspiré entre autres par Stéphane Hessel et son célèbre « Indignez-vous ! »
Le tournage, en 2008, a duré six mois dont quatre intensifs.
Le manque de moyens financiers a contraint le réalisateur à être en immersion complète avec ses comédiens, ce qui confère au film une grande sincérité et une authenticité appréciable.
En 2013, le film est distribué par la Vingt- Cinquième Heure en association avec Auberlywood et Inthemood, soutenu entre autres partenaires par la CIMADE et La Ligue des Droits de l’Homme.
Le titre du film est au pluriel mais l’histoire est au singulier.
C’est l’aventure personnelle de Zola MGOMEZULU (le choix du prénom n’est pas anodin), un jeune Zaïrois qui ressent un besoin irrépressible de vivre ailleurs , malgré l’avis opposé de sa mère .
Le héros (Christian Mupondo), jeune et beau, est filmé de très près. Il est très convaincant et montre une grande sobriété dans son jeu.
Souvent silencieux, il exprime une détermination forte quand il explique au Tribunal pourquoi il veut vivre en France . Ce plaidoyer est un moment fort du film. Sa phrase culte, sa devise est poignante :« Les arbres ont des racines ; moi, j’ai des jambes ! «
Attention, ce film n’est pas un documentaire sur les sans- papiers.
Madame Jacques, présidente de la CIMADE expliquera, dans le débat, que les conditions d’entrée de Zola ne sont pas celles de la plupart des travailleurs immigrés… La migration est un phénomène complexe, on ne peut la résumer à des chiffres ou à un exemple précis.
Mais ce qui est intéressant de voir est le quotidien de ce jeune homme, en proie à la solitude et à la peur, prêt à tout pour survivre en France – qui est très inhospitalière dans ce scénario.
Son désir d’intégration reste intact malgré toutes les souffrances endurées ! Un peu d’espoir surgit quand il rencontre Julie (Léticia Belliccini) …
Laissons le soin au spectateur de découvrir, à la fin du film, comment Zola est réellement rentré dans la France…
Ce film est traité, d’une manière moderne, avec une grande sobriété dans tous les sens du terme : pas d’alcool, pas de drogue, pas de mélo. La musique est très bien, variée et originale.
Mon petit bémol concerne une scène de violence avec la police, qui peut paraître justifiée dans un contexte de traque, mais qui peut alimenter une vision négative de l’immigration.
Au final, « Nous irons vivre ailleurs » pose un regard humain sur la migration. Cette thématique est tragiquement d’actualité avec les récents drames au large de Lampedusa. »Nous irons vivre ailleurs » est un film émouvant à découvrir actuellement ! *
Le débat, animé par Yann Mens du magazine « Alternatives Internationales « , en présence du réalisateur, de Christian Mupondo (Zola), de Léticia Belliccini (Julie ) était particulièrement intéressant dans ce lieu qui sort de l’ordinaire, l’Assemblée Nationale !
Geneviève Jacques, présidente de la CIMADE une femme de conviction, a apporté des informations précieuses.
* Dernière projection débat de l’année : ce dimanche 22 décembre à 11 heures au Majestic Bastille.