THE LOOK OF SILENCE de Joshua Oppenheimer sort au cinéma le 23 septembre 2015.
Un certain magazine français se vante d’allier le poids des mots et le choc des photos …
« The look of silence » réunit, à la fois, le poids et le choc des mots !
Ce remarquable documentaire sur le génocide indonésien de 1965 – qui a causé la mort d’environ un million de personnes – est particulièrement troublant.
Joshua Oppenheimer, né en 1974 aux Etats Unis et basé à Copenhague au Danemark s’intéresse, depuis plus de dix ans, à ces massacres.
Son premier long métrage » The act of killing » qui traitait déjà de ce sujet a obtenu le BAFTA du meilleur documentaire en 2014.
Ce qui est fascinant et effarant dans le présent documentaire- et ce qui me semble assez rare au cinéma- c’est la libération de la parole des tortionnaires.
On ne peut qu’être stupéfait par des révélations d’une cruauté sans nom.
Entendre par exemple que les bourreaux buvaient le sang de leurs victimes pour ne pas devenir fous …cela glace le sang , (désolée pour le mauvais jeu de mots mais c’est vraiment ce que j’ai ressenti ) !
De plus, les responsables des escadrons de la mort racontent ces détails horribles, avec le sourire , persuadés d’avoir bien agi.
D’ailleurs, ces criminels ne se sentent jamais responsables.
Pour l’un des protagonistes, c’est l’Amérique qui est responsable car c’est elle qui leur a « appris à détester les communistes « …
Cette logique implacable, l’absence de regrets font vraiment penser à la théorie de Hannah Arendt sur la banalité du mal .
Il est rare également que dans un générique de fin, les techniciens du film soient des « anonymous », ce qui montre que le danger existe toujours dans ce pays.
Mais ce film, aussi profond et intéressant soit- il, m’a laissé un certain sentiment de malaise .
Cela est dû, sans doute, au fait que le spectateur est soumis à une rude épreuve de voyeurisme .
La caméra filme avec talent les confrontations entre Adi et les assassins de son frère.
Mais la caméra filme aussi, avec une grande insistance, le corps nu décharné du père d’Adi, qui serait âgé de 104 ans.
Ce dernier sourd , aveugle, infirme , divague, à un moment, dans une pièce où il semble avoir perdu tous ses repères.
On se retrouve alors dans un reportage très cru sur la vieillesse qui rajoute au climat déjà très pesant provoqué par la description du génocide.
Malgré ces quelques réserves , je recommande « The look of silence » qui est une œuvre instructive, courageuse et inoubliable.
Produit par Werner Herzog et Errol Morris, le film a remporté le Grand Prix du Jury à la Mostra de Venise 2014 ainsi que le prix FIPRESCI de la critique internationale .
Il a reçu le Prix du Public au Festival Premiers Plans d’Angers et le Grand Prix au Festival de Valenciennes.
Michèle
Bande annonce