Pour son premier film en tant que réalisateur, l’acteur britannique Ewan McGregor n’a pas choisi la facilité en adaptant American pastoral, le célèbre roman de Philip Roth paru en 1997… il interprète aussi le rôle principal aux côtés de Jennifer Connelly et Dakota Fanning dans ce drame familial en salle le 28 décembre.
Voici mon avis.
Synopsis
L’Amérique des années 60. Autrefois champion de sport de son lycée, Seymour Levov, dit « le Suédois », est devenu un riche homme d’affaires marié à Dawn, ancienne reine de beauté. Mais les bouleversements sociopolitiques de l’époque font bientôt irruption dans la vie bourgeoise, en apparence idyllique, de Seymour. Lorsque sa fille adorée, Merry, disparaît après avoir été accusée d’acte terroriste, il part à sa recherche pour que sa famille soit de nouveau unie. Profondément ébranlé par ce qu’il découvre, il doit affronter le chaos qui secoue la société américaine et jette les bases d’un nouveau monde. La vie de famille ne sera plus jamais la même…
Avis sur « American Pastoral » : Il était une fois en Amérique
Ewan McGregor aime les défis… Adapter le monument de la littérature américaine qui a valu à Philip Roth le prix Pulitzer de la fiction en 98, ce n’était pas rien ! D’autant plus que ce roman-fleuve est réputé inadaptable.
N’ayant pas lu les 448 pages de cette fresque littéraire, je ne peux pas comparer mais on se doute bien que le scénario a dû élaguer énormément le roman pour n’en garder que la substantifique moëlle. En fait le point d’orgue du film, et ce qui semble intéresser Ewan McGregor, c’est la relation entre Seymour Levov dit « le Suédois » et sa fille Merry.
C’est l’occasion idéale pour le réalisateur de dépeindre à travers cette relation, le conflit de génération, et la mutation subie par les Etats -Unis pendant les sixties.
Tel Forrest Gump, « le Suédois » traverse les crises de la société ; il est témoin d’émeutes raciales, de la guerre du Vietnam, mais témoin comme un Américain lambda, souvent épargné par les conflits et souvent derrière son poste de télévision, puisque les Levov vivent dans une Amérique rurale, en dehors d’une grande ville.
Tel Gatsby le Magnifique, « le Suédois » semble avoir tout pour être heureux. Mais Levov n’arrivera jamais à « sauver » sa fille , encore moins à se se faire respecter d’elle … Pour ce qui est de se faire aimer, je n’en dirai pas plus…
Il n’arrivera pas non plus vraiment à communiquer avec sa femme, obsédé par l’idée de retrouver sa progéniture. Autre point commun avec Gatsby, c’est que l’histoire du protagoniste est contée et construite par un ami, qui admirait le jeune Levov…
C’est l’alter ego de Roth, la voix off du film Nathan Zuckerman (joué par David Strathairn), tout comme lui nous découvrons ce qui s’est passé…
Roth désacralise l’enfant, Merry est une jeune fille par qui le malheur et la mort arrivent. Elle fera éclater la cellule familiale, la mariage de ses parents qui pourtant semblent unis, malgré leur différence de religion et de culture. Pour incarner cette rebelle en guerre contre sa famille et son pays, McGregor a fait appel à Dakota Fanning qui tire son épingle du jeu dans un double rôle : celui d’une ado révoltée dans la première partie, puis celui d’une jeune femme éteinte et fantomatique dans la seconde, Merry étant devenue membre d’une secte fanatique.
Cette Merry est bien le contraire de son prénom, elle est tout sauf joyeuse, et il faut le souligner, c’est un personnage dérangeant et différent des rôles de jeunes femmes classiques que nous propose Hollywood.
Le parallélisme avec les jeunes occidentaux devenant terroristes de nos jours est inévitable et, il faut le dire, glaçant. D’autant plus que Levov et sa femme sont à l’écoute, consultent un psy pour leur fille (un peu douteuse sur le plan moral on le verra). Bref, ils font ce qu’ils peuvent, et je pense que de nombreux parents auraient eu les mêmes réactions que les Levov.
AMERICAN PASTORAL est assez prenant sur le moment et bien interprété, avec de vrais moments d’émotions. Malgré tout, il m’a manqué quelque chose pour que je sois totalement conquise. Peut-être parce que le scénario de John Romano donne une image de Levov un peu trop lisse, j’ai trouvé le personnage un peu trop parfait. Peut-être est ce parce que j’ai trouvé qu’il y avait des longueurs, peut-être parce que la fin est certes très émouvante, mais aussi frustrante. Peut-être aussi que je sature des drames ?
La mise en scène est classique, on imagine que Mc Gregor devait adorer le roman, et qu’il ne s’est pas autorisé de fantaisie, d’autant plus que cette fresque familiale n’a pas besoin de fanfreluches visuelles pour être marquante. En ce qui concerne la musique, les compositions signées Alexandre Desplats n’ont pas du tout retenu mon attention, je n’ai reconnu que quelques tubes des années soixante.
Voilà encore un film qui casse le rêve américain, en tout cas le rêve d’une vie paisible (la pastorale américaine) de Levov. Les thèmes du film (l’embrigadement, le racisme, le terrorisme) sont toujours d’actualité un demi-siècle après.
On ressort du film triste, un peu sonné et avec un goût amer dans la bouche. Vous l’avez compris, ce n’est pas le genre de films qui détend ou remonte le moral…
Pour un coup d’essai, on ne peut pas reprocher grand-chose à la mise en scène de Mc Gregor mais il ne reste plus qu’à espérer que son prochain sujet ne soit pas une adaptation, afin qu’il puisse s’affranchir du style et développer son style, son regard de cinéaste.
American Pastoral
Date de sortie : 28 décembre 2016 (1h 48min)
De Ewan McGregor
Avec Ewan McGregor, Jennifer Connelly, Dakota Fanning …
Depuis le temps que je me dis qu’il faudrait que je lise le roman… je vais peut-être passer directement au film ! 😀