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[Vie de blog] Jurée au Grand Prix Cinéma ELLE : le compte-rendu

Passer un long week-end en compagnie d’autres cinéphiles et participer à un jury de cinéma. Le rêve de toute ciné-fille, devenu réalité grâce au magazine ELLE. Voici un article sur le  Grand Prix Cinéma ELLE – en 3 parties (pour suivre les conseils dispensés par le film « Quai d’Orsay »).

Owly Images

Le fabuleux destin de jurée de cinéma.

Voir 8 films en (presque) trois jours, épisclérite et fatigue assurées ?
Chers lecteurs, je vous rassure tout de suite :  aucune jurée n’a été maltraitée pendant ce long week-end. On peut même dire que nous avons été carrément chouchoutées ! Nourries, hydratées, nous avons fait des pauses bien méritées, pauses qui ont permis aux plus bavardes d’entre nous de discuter des films et aux plus émues de se remettre de leurs émotions. C’est un rythme finalement beaucoup plus cool qu’un festival.

Dès notre arrivée au Gaumont Parnasse, nous recevons un « kit de survie » :  un badge, un carnet de notes et un stylo qui fait de la lumière –  j’adore ! Et d’ailleurs j’en ai usé et abusé pour prendre des notes !  Une salle de cinéma nous était dédiée, nous étions donc dans d’excellentes conditions. L’ambiance était chaleureuse, nous avons beaucoup ri hors des projections. Bref, deux jours et demi de partage entre 50 jurées et une équipe au top.

Aux urnes, cinéphiles !

Je vous avais déjà un peu décrit le fonctionnement du Grand Prix ici. Deux débats ont eu lieu. Le premier a eu lieu le samedi, nous avions alors vu la moitié des long-métrages sélectionnés. Nous avons continué le dimanche après le dernier film « Quai d’Orsay ». Ce que j’ai trouvé vraiment formidable, ce sont les différences de ressentis. D’habitude, je parle d’un film avec un panel composé d’amis, de blogueurs et de membres de ma famille. Au grand prix, nous étions 50 à Paris et 150 en tout (un jury se réunissait également à Marseille et à Bordeaux) ! Les échanges étaient donc très riches, et les avis souvent bien tranchés !

En plus du débat, nous avons attribué une note (sur 10) à chaque film de la sélection. Cette notation a été transmise à l’équipe du magazine ELLE sous forme de bulletin. Les votes de la section parisienne seront ensuite être additionnés à ceux des villes de Marseille et Bordeaux. (150 X  8 fois bravo à ceux et celles chargés du dépouillement). Les résultats seront annoncé lors d’une cérémonie.

La soirée de remise du Grand Prix Cinéma ELLE se déroulera le 7 octobre prochain à Paris et désignera le film gagnant.
A noter :  le ou la réalisatrice est invitée à recevoir son prix des mains du précédent gagnant… La dernière partie de ce billet vous présentera la sélection ELLE, un court avis sur chaque film, ainsi qu’un pronostic.

 Une sélection de haut niveau, difficile à départager !

Une petite remarque  introductive : les films sélectionnés étaient très différents. Il n’y a aucun fil conducteur… La famille et le manque de communication reviennent en revanche presque tout le temps. Nous avons vu dans l’ordre :

« Tel père, tel fils » de Hirozaku Kore-Eda : la vie n’est pas un long fleuve tranquille.
Extrêmement touchant et pudique; Kore-eda m’avait profondément émue avec son marquant « Nobody knows ». Ici encore,  il y est question d’enfants… ici encore, j’ai pleuré. Par contre, cette fois, le réalisateur n’adopte pas un regard d’enfant.  Au début, je trouvais le film beau mais froid, et puis l’émotion m’a submergée … Si vous le pouvez, ne lisez pas le synopsis, n’essayez pas d’en savoir trop sur ce film et laissez-vous porter. L’interprétation est superbe, enfants et adultes confondus. Une belle réflexion sur la transmission, l’éducation, la filiation, les liens du sang et les liens du cœur. Le seul point négatif : quelques longueurs. Mais la mise en scène est tellement superbe, et l’enjeu tellement prenant qu’on ne s’ennuie pas et qu’on attend le dénouement avec impatience.
Prix du jury au festival de Cannes 2013.

Pronostic : en discutant un peu, je ne pense pas que le film ait le prix…
Il devrait cependant arriver bien placé au vu de ses qualités. (En 2e, 3e ou 4e position ?)

« Les garçons et Guillaume, à table ! : Guillaume se met à table et sur le divan !
Le film-confession de Guillaume Gallienne m’a séduite. A mon tour de faire une confession : je l’avais vu quatre jours auparavant, alors je ne suis pas restée pour la projection.( Je le reverrai avec plaisir, mais plus tard…)
On assiste à une vraie catharsis et pourtant on rit, beaucoup et très souvent  !  L’acteur réalisateur fait preuve d’une belle sincérité doublée d’une forte propension à l’auto-dérision. Gallienne pratique la confusion des genres avec adresse : genre dramatique et comique, théâtre et cinéma, féminin et masculin… Et le sociétaire de la Comédie-Française imite les femmes, sa mère en particulier, comme personne. D’ailleurs, Guillaume Gallienne interprète les deux rôles. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, l’acteur ne se contente pas de mettre sa pièce de théâtre en images : il y a de vrais moments de cinéma, à mon avis. Sincère, émouvant et très drôle. Cela faisait un moment que je n’avais pas ri comme cela au cinéma !

NB : Le film a été présenté au festival de Cannes, Deauville et Angoulême… Il a déjà remporté quelques récompenses.


Pronostic
: la rumeur disait samedi matin que le film avait toutes ses chances de remporter le Grand Prix. J’en serais très heureuse.

« Gabrielle » de Louise Archambault.

Ce film québécois a particulièrement ému l’assistance, je fais partie des cœurs de pierre, i.e : je n’ai pas pleuré.  J’ai trouvé que certaines scènes étaient inutiles. Certains effets de style m’ont déplu, mais ce film est traversé par des moments de grâce…

L’histoire d’amour contrariée entre ces deux jeunes adultes pas comme tous les autres touche profondément, car finalement, ce qu’ils veulent, c’est vivre une histoire d’amour banale. La relation entre Gabrielle et sa soeur(l’actrice qui joue la jumelle dans Incendies), et Gabrielle et sa mère est aussi très bien vue. Les scènes de concert avec Robert Charlebois sont super. Un film sensible sur le handicap et la famille.

Pronostic : si, stratégiquement, celles qui ont aimé ont mis une très bonne note, le film a toutes ses chances !

« The lunchbox » (Dabba) de Ritesh Batra. Épices, panier repas, correspondances et festival de « Khan » : une bonne recette !

Sur le coup, lors du débat et à la sortie de la projection, j’étais très inspirée par ce film qui m’a beaucoup plu… Je vais rester concise ici.

J’ai au moins cinq bonnes raisons d’aimer ce  film. Raison n°1 :  j’aime beaucoup le cinéma indien, et je me réjouissais que celui-ci ait avec une date de sortie . Raison n°2 : mon acteur chouchou Irrfan Khan (L’Odyssée de Pi…)  joue dedans et il a l’un des rôles principaux. Raison n°3 : « The lunchbox » est une comédie romantique avec des instants plus dramatiques (et moi j’aime ce mélange). Raison n°4 : j’ai appris quelque chose sur la société indienne (l’organisation autour des paniers repas, étudiée par Harvard). Raison n°5 :  c’est un film « culinaire » et il donne envie de manger, et de faire la cuisine. La combinaison de tous ces ingrédients font de « The lunchbox », un film très savoureux.

A noter que le film a été présenté au festival de Cannes 2013 (coïncidence ou non,  l’Inde était le pays mis à l’honneur au festival cette année.)

Pronostic : Gros coup de cœur pour certaines, film assez anodin pour les autres … Les réactions sont loin de susciter un consensus, donc je ne pense pas qu’il gagnera.

« The Immigrant« de James Gray : la déception !

Déception, parce que réalisateur doué. Parce que sélectionné au festival de Cannes. Parce que Joaquin Phoenix était présent, et que c’est un grand acteur, au jeu  » borderline », à la frontière du sur-jeu sans jamais tomber dedans ! Ici encore, Phoenix incarne un personnage très complexe, foncièrement intéressant. [Ceci dit, on commence à être habitués, il nous avait déjà fait une superbe performance dans « The Master ».]
James Gray semble préférer nous montrer le point d’une femme. Pourquoi pas, mais j’aurais voulu en savoir plus sur le personnage de Joaquin Phoenix, ce Bruno Weiss.

Marion Cotillard alias Ewa, a un rôle d’héroïne tragique. Ce n’est pas son pire rôle ni son meilleur…  Son jeu ne m’a pas spécialement marquée mais le lourd destin d’Ewa ne peut laisser totalement indifférent. Gray est fasciné par le visage de l’actrice et la filme comme une madone. Il est assez étonnant d’entendre parler polonais « La Môme » Cotillard. Au passage, il faut signaler que la photo est magnifique – merci Darius Khondji ! – notamment dans une scène de confession à l’église. (Comme souvent chez James Gray,  la religion est présente, les thèmes de la culpabilité, de la honte, de la rédemption et du pardon sont particulièrement développés… )

Ce n’est pas le seul film sur Ellis Island, et personnellement j’ai trouvé le Golden door d’Emmanuel Crialese beaucoup plus intéressant. Peut-être que nous étions en pleine digestion car au « debriefing » la plupart des spectatrices semblait déçues également. Les fans absolues attendaient peut-être que le réalisateur refasse la même chose … Il faut tout de même saluer l’effort du réalisateur de changer d’univers, et de ne pas nous resservir un autre « Two Lovers » ou « The Yards ».
Au final, malgré toutes ses qualités, cette fresque historique est plombée par son scénario.

Pronostic : je ne pense pas que ce mélodrame historique soit le gagnant,  il devrait même arriver dans les derniers…


« Casse-tête chinois » de Cédric Klapisch.
J’attendais avec impatience la suite et fin de  « L’Auberge espagnole » et des « Poupées russes ». Le film m’a beaucoup parlé, et j’apprécie le style Klapisch. J’ai noté de nombreuses répliques(on le voit d »ailleurs sur la fiche film ci-dessus).Enfin j’ai énormément ri, comme beaucoup d’entre nous. Alors, bien sûr, il faut aimer le réalisateur et avoir vu les précédents épisodes pour apprécier pleinement les retrouvailles de Xavier et de ses amies.

Pronostic : lors du débat les avis « négatifs » étaient peut-être plus présents, mais je continue à croire que ce troisième est le meilleur, avec le premier, et je pense que je ne serai pas la seule à le soutenir !

Suzanne

« Suzanne » de Katell Quillévéré : les malheurs de Suzanne (et de sa famille).

 Excellente interprétation de François Damiens, Sara Forestier et Adèle Haenel. Les seconds rôles sont aussi superbes. Je reste cependant assez perplexe. Quel est l’objectif, le message de ce film ?  Où la réalisatrice veut-elle nous emmener ?  Dans « Suzanne », on parle de deuil, de  culpabilité, de prise de conscience, de maternité, d’amour filial et de passion aveuglante. En fait, de pas mal de choses… Le film fait une référence explicite au « Suzanne » de Pialat et à la chanson de Léonard Cohen. Il faut du temps pour digérer ce drame social ! Chacun a ses raisons pour agir de telle ou telle façon, et la réalisatrice ne juge pas ses personnages, elle semble plutôt les aimer. Il y a des moments très forts, et le scénario est curieux, très elliptique, avec des moments très forts et d’autres légèrement ennuyeux. L’une des jurées a parlé de tranche de vie lors du débat :  c’est exactement ce que j’avais noté sur mon carnet ! Je serais curieuse de connaître l’avis du jury de Marseille,  le film se déroulant dans leur région.
NB :  ce film fit l’ouverture de la Semaine de la Critique au Festival de Cannes 2013.

Pronostic :  les jurées étaient assez divisées sur ce film : une des jurées était en pleurs lors du débat, c’est dire si le film a marqué les esprits.  Un film qui pourrait recevoir un prix.

quai d'orsay

 « Quai d’Orsay« de Bertrand Tavernier : l’Exercice du blabla.

… Avec un Thierry Lhermitte en ministre des Affaires Étrangères qui cite tour à tour Héraclite  ou Tintin et maîtrise l’art de faire claquer les portes… toute ressemblance avec un ministre ayant existé est fortuite…  Niels Arestrup en homme de l’ombre et Raphaël Personnaz en jeune Candide sont également très drôles. Cette adaptation très réussie de la bande dessinée de Christophe Blain et d’Abel Lanzac ne m’a pas déçue !  Et pourtant j’avais quelques craintes, la mode étant aux adaptations de BD comiques… Au Quai d’Orsay,  les répliques fusent, il y a quelques trouvailles visuelles.On rit (parfois jaune) de l’absurdité des situations… et du comique de répétition. On sent que c’est un réalisateur « solide » qui est derrière la caméra. Un film très réussi dans son genre.

 Pronostic :
Je ne sais pas si le film sera le lauréat, d’autres films étant bien plus « forts » en émotions.
Un bon nombre nombre d’entre nous ont trouvé le film trop bavard, et Thierry  Lhermitte, pas toujours juste.(Moi pas)

En revanche, j’ai trouvé le film malin et amusant, et je le conseillerai aux amateurs de comédies, aux personnes intéressées par la politique… ainsi qu’aux fans de la bande dessinée originelle.

Merci à ELLE et aux cinéma Gaumont Pathé !

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