Je suis fan de P &P.
Non, ce n’est pas une marque de vêtements ou de bonbons ! P & P sont les initiales de deux grands réalisateurs – scénaristes – producteurs britanniques indépendants, officiant dans les années 1940 et 50 : Michael POWELL et Emeric PRESSBURGER.
Sur le blog, je vous parlais déjà de deux de leurs chefs d’œuvre : Le Narcisse noir (Black Narcissus, 1947) et Les Chaussons rouges (The Red Shoes, 1948). J’ai beaucoup apprécié également Colonel Blimp (The Life and Death of Colonel Blimp)…*
A ma « collection », il manquait Une question de vie ou de mort.
Heureusement, Carlotta a eu l’excellente idée de ressortir le film en version restaurée ce 11 décembre, juste avant les fêtes de fin d’année. Le film passe au Champo sur Paris en ce moment.
Avis : UNE QUESTION DE VIE OU DE MORT
Au départ, Une question de vie ou de mort était un film de commande de l’armée britannique pour renforcer l’amitié entre Britanniques et Américains ; en effet, après l’armistice de 1945, les armées britanniques et américaines occupaient conjointement le territoire européen et les heurts entre les deux armées étaient fréquentes. Mais pour Powell et Pressburger, « commande » ne signifiait pas « plan plan ». Les deux cinéastes ont créé une œuvre atypique, avec de nombreux effets spéciaux et une histoire fantastique.
Une question de vie ou de mort contient plusieurs films en un… Une histoire d’amour en période de guerre, entre vie et mort – finalement « Ghost » et « Always » n’ont rien inventé… C’est à la fois un film fantastique et un film de procès… Le scénario laisse la porte ouverte à plusieurs explications, comme on le souligne dans le communiqué de presse. Peter (Niven) est-il vraiment entre la vie et la mort ou souffre-t-il d’hallucinations dues à la guerre (choc post-traumatique) ? Au spectateur de choisir. On en s’ennuie donc pas, si on accepte de suivre les aventures de Peter et de la femme de sa vie.
Et Powell et Pressburger honorent leur contrat : le film prône l’amitié ( voire l’amour) américano-britannique. Kim Hunter incarne June, une jeune militaire américaine (de Boston, cela a son importance, vous verrez), qui s’éprend de David Niven, l’officier anglais pure souche. Et surtout le procès de Peter au purgatoire-paradis devient le procès de la perfide Albion par un juge américain. Le scénario des Powell et Pressburger s’amuse des clichés sur les Anglais et les Américains ; on sourit devant cette « guéguerre » qui se termine bien.
Ajoutez à cela des acteurs sont très bons. Dans le casting, on retrouve deux mascottes des réalisateurs : Roger Livesey (Colonel Blimp) et Marius Goring (Les Chaussons rouges). Le couple d’amoureux est joué par David Niven et Kim Hunter (La planète des singes). Mais aussi on aperçoit aussi Kathleen Byron qui joue un ange officier ( elle est la nonne déchue du Narcisse Noir ), et Richard Attenborough en pilote britannique.
Enfin, Une question de vie ou de mort recèle d’idées de mise en scène et de trouvailles visuelles.
Citons ainsi un escalier céleste, sorte d’ « échelle de Jacob » qui ressemble fort à un escalator, ou encore des images de temps suspendu par le personnage facétieux du guide 71 (Marius Goring incarne avec délectation un noble français guillotiné.)
Cependant, la plus belle idée de Powell et Pressburger est de filmer le monde des vivants en Technicolor et le très bureaucratique « Paradis » en noir et blanc.
A partir d’une commande, Powell et Pressburger ont créé une oeuvre atypique. Poétique, fantastique, romantique, Une question de vie ou de mort est à redécouvrir pour son scénario malin et sa beauté visuelle. On appréciera d’autant plus le Technicolor avec la version restaurée 2 K!
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UNE QUESTION DE VIE OU DE MORT
(A matter of Life and Death)
Un film de Michael POWELL & Emeric PRESSBURGER ( 1946)
Reprise le 11 décembre 2013 (version numérique restaurée 2K )
104mn
Couleurs/N&B
Scénario : Michael POWELL & Emeric PRESSBURGER
Avec : David NIVEN, Raymond MASSEY, Kim HUNTER (La planète des singes), Marius GORING, Roger LIVESEY, Bonar COLLEANO, Bob ROBERTS, Abraham SOFAER, Robert COOTE
Musique : Allan GRAY
Directeur de la photographie : Jack CARDIFF
Montage : Reginald MILLS
Producteurs : Michael POWELL & Emeric PRESSBURGER, George R. BUSBY, Robert C. FOORD
Production : The Archers
Synopsis
Durant la Seconde Guerre mondiale, le pilote britannique Peter Carter survit miraculeusement à un avion en flammes. Il retrouve alors June, l’opératrice radio américaine avec laquelle il était en contact avant de sauter de son avion. Les deux filent le parfait amour jusqu’à ce qu’un messager de l’au-delà vienne dire à Peter que sa survie n’était qu’une erreur. Son sort devra être tranché devant un tribunal céleste…
* Colonel Blimp, c’est l’histoire d’un officier anglais qui traverse trois guerres (Guerre des Boers, Première et et Seconde Guerres Mondiales) et se lie d’amitié avec un officier allemand – la thématique d’amitié entre ennemis de guerre rejoint celle de La Grande Illusion de Jean Renoir avec le duo Jean Gabin /Erich von Stroheim... Le « héros » Clive Wynne-Candy (Roger Livesey) rencontre trois femmes à trois époques différentes qui ont toutes le même visage (Deborah Kerr présente également dans le Narcisse Noir incarnait les trois rôles.)
Je note ce titre, il est temps que je comble mes lacunes !
Et je te conseille les Chaussons rouges, d’après un conte d’Andersen… je crois que tu as déjà vu Le Narcisse noir ?